Lettre d'information 2020/4
Introduction
C’est avec un grand plaisir que je vous présente la quatrième lettre d’information du TIDM en 2020, qui est la première sous ma présidence du Tribunal.
En raison de la pandémie de COVID-19, les deux derniers mois ont assurément été difficiles pour tout le monde et le Tribunal n’est pas le seul à chercher des solutions novatrices pour adapter ses méthodes de travail aux nouvelles circonstances. À sa cinquantième session, en septembre 2020, le Tribunal a modifié son Règlement afin de permettre, à titre exceptionnel, la tenue de tout ou partie des audiences et séances par liaison vidéo, suivant ainsi la tendance mondiale. Pourtant, pour une cour ou un tribunal international, l’organisation d’audiences n’est pas qu’une simple question de mise en place d’une plateforme pour permettre la tenue d’une réunion avec des participants partout dans le monde. Dans une procédure orale, il est fondamental qu’il y ait un échange direct d’arguments entre les parties et aussi que l’accès du public à cette procédure soit garanti – les audiences devant le Tribunal sont ouvertes au public, comme le prévoient le Statut et le Règlement du Tribunal. Les récentes audiences dans l’affaire du Différend relatif à la délimitation de la frontière maritime entre Maurice et les Maldives dans l’océan Indien (Maurice/Maldives) ont montré que le Tribunal a été à la hauteur du défi et qu’il a prouvé qu’il pouvait s’acquitter de ses fonctions malgré les difficultés causées par la propagation de la pandémie de COVID-19. Dans ces circonstances exceptionnelles, le Tribunal a été en mesure de continuer à fonctionner pour accomplir le mandat qui lui a été confié par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer.
La cinquantième session du Tribunal a débuté dans le courant de la dernière semaine de septembre. Cette session a été particulièrement remarquable, car le mandat des juges Ndiaye, Cot, Lucky, Gao et Kelly est arrivé à son terme le 30 septembre 2020. Chacun de ces juges a grandement contribué aux travaux du Tribunal, et nous regretterons de ne plus pouvoir faire appel à leur vaste expérience. Nous les remercions pour les éminents services rendus et leur adressons nos vœux les meilleurs pour l’avenir. Lorsqu’une époque se termine, une nouvelle commence, et le 1er octobre 2020, les juges Infante Caffi, Duan, Brown, Caracciolo et Kamga, qui ont été élus par les États Parties à la fin du mois d’août, ont prêté serment en tant que membres du Tribunal pour un mandat de neuf ans. Nous leur souhaitons la bienvenue au Tribunal et nous ferons un plaisir de travailler avec eux.
Le mandat de Président du juge Paik a pris fin le 30 septembre 2020 et, le 2 octobre 2020, j’ai moi-même été élu Président pour les trois prochaines années par les membres du Tribunal. Le juge Heidar a été élu Vice-Président pour la même période. Le Tribunal a également reconstitué ses chambres tout en élisant la juge Chadha Présidente de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, le juge Pawlak Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries et le juge Attard Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs au milieu marin.
Après la clôture de la session, la Chambre spéciale a tenu ses audiences sur les exceptions préliminaires soulevées par les Maldives dans l’affaire du Différend relatif à la délimitation de la frontière maritime entre Maurice et les Maldives dans l’océan Indien (Maurice/Maldives). Sur les neuf membres de la Chambre, cinq juges et un juge ad hoc étaient présents à Hambourg et deux juges et un juge ad hoc participaient par liaison vidéo. Les parties étaient représentées par des délégations dont les membres ont paru devant la Chambre aussi bien virtuellement qu’en personne. La Chambre spéciale procède actuellement au délibéré et annoncera sa décision au début de 2021.
Comme je l’ai indiqué, l’élection des membres du Tribunal a eu lieu fin août 2020, à la première réunion en présentiel tenue dans la salle de l’Assemblée générale depuis que le confinement a commencé en mars 2020. D’autres séances de la trentième Réunion des États Parties ont été tenues en ligne. Les allocutions écrites, y compris la mienne (qui présente à la Réunion le rapport annuel du Tribunal pour 2019 et lui rend compte des faits nouveaux au Tribunal), ont été distribuées aux États Parties et l’examen du budget du Tribunal pour 2021/2022 se fait dans le cadre d’une série de réunions virtuelles. Une réunion finale en présentiel se tiendra en principe début décembre 2020.
J’ai le plaisir de vous informer que les programmes du Tribunal en matière de renforcement des capacités se sont rapidement adaptés aux circonstances et qu’aussi bien le programme Nippon que le programme de stage fonctionnent, en dépit des contraintes liées à la pandémie. J’ai eu le plaisir de pouvoir signer en octobre un nouveau protocole d’accord avec le Korea Maritime Institute (KMI), qui prévoit un nouvel appui financier destiné au programme de stage et à la future tenue d’un atelier régional. Nous sommes très reconnaissants au KMI pour ce soutien aux programmes du Tribunal en matière de renforcement des capacités.
Une nouveauté au Tribunal dans le renforcement des capacités est la possibilité d’organiser des visites virtuelles du Tribunal pour les praticiens du droit et les étudiants en droit. Il est possible d’organiser ces visites à la fois pendant que les visites physiques au Tribunal sont limitées en raison de la pandémie et aussi pour permettre une visite du Tribunal à ceux qui sinon ne seraient pas en mesure de se rendre à Hambourg ; cette offre sera assurément bien accueillie par les étudiants en droit de la mer du monde entier.
J’espère que vous aurez plaisir à lire notre lettre d’information.
Très chaleureusement,
Le Président,
Albert Hoffmann
Affaires devant le Tribunal
Affaire no 28 : Différend relatif à la délimitation de la frontière maritime entre Maurice et les Maldives dans l’océan Indien (Maurice/Maldives)
Par ordonnance du 15 septembre 2020, le Tribunal a déterminé que le juge Pawlak occuperait le siège devenu vacant à la Chambre spéciale par suite de la démission du juge Cot. La Chambre se compose désormais comme suit : Président : M. Paik ; membres : MM. Jesus, Pawlak, Yanai, Bouguetaia, Heidar et Mme Chadha ; juges ad hoc : MM. Oxman et Schrijver.
Les audiences publiques de la phase des exceptions préliminaires en l’espèce se sont tenues du 13 au 19 octobre 2020 sous forme hybride. À la clôture de la procédure orale, les parties ont donné lecture de leurs conclusions finales, qui sont consultables sur le site web à la page dédiée à l’affaire, avec les pièces de procédure, les comptes rendus des audiences, les archives des webdiffusions des audiences et des photographies. La Chambre spéciale tient actuellement son délibéré et prévoit de rendre son jugement sur les exceptions préliminaires des Maldives au début de 2021.
Affaire no 29 : Affaire du navire « San Padre Pio » (no 2) (Suisse/Nigéria)
Conformément à l’ordonnance 2020/1 du 7 janvier 2020, les Parties se trouvent actuellement dans la phase de procédure écrite de l’affaire.
Membres du Tribunal
Lors d’élections tenues du 24 au 26 août 2020, cinq nouveaux juges ont été élus membres du Tribunal par la trentième Réunion des États Parties à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer. Les États Parties ont réélu le juge Attard (Malte) et le juge Kulyk (Ukraine), et ils ont élu Mme María Teresa Infante Caffi (Chili), M. Jielong Duan (Chine), Mme Kathy-Ann Brown (Jamaïque), Mme Ida Caracciolo (Italie), et M. Maurice Kamga (Cameroun). Lors d’une cérémonie publique tenue le 1er octobre 2020, les cinq nouveaux juges ont prêté serment en tant que membres du Tribunal pour un mandat de neuf ans.
Avec ses membres nouvellement élus, le Tribunal maintient sa répartition géographique de l'ensemble des sièges (Afrique : cinq ; Asie : cinq ; Amérique latine et Caraïbes : quatre ; Europe orientale : trois ; et Europe occidentale et autres États : quatre), mais dispose désormais d’une nouvelle représentation des deux sexes, avec 16 hommes et 5 femmes.
Entretien avec le Président Hoffmann
Membre du Tribunal depuis 2005, vous y avez assuré les fonctions de Vice-Président de 2011 à 2014 de même que celles de Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins de 2017 à 2020. Que pensez-vous de l’évolution du Tribunal depuis que vous en êtes membre et où espérez-vous qu’il sera dans trois ans, lorsque vous terminerez votre mandat de Président ?
Avant de répondre à cette question, je souhaite souligner le privilège qui a été le mien de contribuer à l’héritage institutionnel de cette juridiction. Lorsque j’ai rejoint le Tribunal en 2005, j’en étais le benjamin (même si cela n’a duré que trois ans), et j’ai l’honneur de dire que j’y ai côtoyé des juges qui étaient au Tribunal depuis sa création. Certains d’entre eux avaient participé à la troisième Conférence des Nations Unies sur le droit de la mer, et j’ai eu suffisamment de chance pour apprendre d’eux et travailler à leurs côtés. Comme c’est le cas pour les autres institutions créées par la Convention, on peut définir les dix premières années de l’existence du Tribunal comme « l’ère de la post-codification », dont le but était d’établir les pratiques et les procédures pertinentes du Tribunal. Durant cette période, le Tribunal a surtout tenu des procédures urgentes, dans le cadre desquelles il a exercé sa compétence obligatoire pour examiner des demandes de prompte mainlevée de navires et de prompte libération de leurs équipages, et des demandes en prescription de mesures conservatoires. Le Tribunal a statué sur neuf affaires de prompte mainlevée durant cette période et je pense que l’absence d’affaires de prompte mainlevée dans la période récente de son existence constitue la preuve que le droit à cet égard a dans une large mesure été bien établi. La jurisprudence du Tribunal s’est ensuite élargie pour inclure des différends concernant la délimitation maritime, des aspects relatifs au milieu marin, des activités de pêche, des questions relatives aux transports maritimes et à la navigation en général, et deux avis consultatifs importants. Il ne fait aucun doute que le Tribunal s’est imposé comme un acteur important dans le règlement des différends relatifs au droit de la mer, et je suis convaincu que sa jurisprudence procure aux États un sentiment de prévisibilité et de certitude. Par rapport au temps qui est souvent nécessaire pour régler des différends internationaux, trois ans, ce n’est pas beaucoup. J’espère pourtant que durant mon mandat de Président, le Tribunal continuera non seulement sur sa voie actuelle, qui consiste à régler pacifiquement les différends concernant l’interprétation ou l’application de la Convention et à étoffer sa jurisprudence, mais qu’il s’adaptera aussi aux faits nouveaux et aux circonstances changeantes touchant le droit de la mer pour faire face aux difficultés qui les accompagnent en continuant de préciser et de développer le cadre du droit de la mer.
Vous avez été élu Président du Tribunal le mois dernier lors d’une session tenue sous forme hybride, au cours de laquelle le Tribunal a également modifié son Règlement afin de permettre la tenue d’audiences et de séances par liaison vidéo. Selon vous, quel rôle vont jouer ces modifications à l’avenir ?
Les modifications en question permettent au Tribunal ou au Président, à titre exceptionnel, lorsque des raisons de santé publique, des motifs de sécurité ou d’autres motifs impérieux l’exigent, de tenir des audiences et des séances par liaison vidéo. Comme c’est le cas pour de nombreuses institutions et entreprises dans le monde, il est essentiel que le Tribunal reste innovant dans l’exécution de son mandat et s’adapte efficacement pour surmonter les nouvelles difficultés. J’estime que ces modifications ont facilité le bon déroulement de la cinquantième session du Tribunal et qu’elles ont déjà été mises en pratique au cours de la phase des exceptions préliminaires de l’Affaire No. 28, où il y a eu un mélange de participation virtuelle et présentielle. Ces modifications permettent par conséquent au Tribunal de garder l’initiative pour s’acquitter de ses fonctions judiciaires et autres. Je tiens pourtant à souligner que la nature internationale du mandat du Tribunal et la distribution géographique de ses membres exigent que ces modifications ne s’appliquent qu’à titre exceptionnel aux fins mentionnées.
Les audiences de la phase des exceptions préliminaires de l’Affaire No. 28 (Maurice/Maldives) viennent de s’achever devant une chambre spéciale du Tribunal. Que pensez-vous du potentiel qu’ont divers fors (y compris les chambres spéciales) et procédures prévus par la CDNUM pour répondre aux questions d’actualité touchant le droit de la mer, notamment l’élévation du niveau de la mer et la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale ?
La Convention donne aux États un cadre souple pour régler leurs différends et les chambres spéciales ne constituent qu’une possibilité de ce faire parmi plusieurs autres. À ce jour, des chambres spéciales ont été constituées dans les affaires No. 7 (Chili/Union européenne) et No. 23 (Ghana/Côte d’Ivoire) ainsi que dans l’Affaire No. 28 (Maurice/Maldives), qui est pendante. La composition et la taille des chambres spéciales doit être approuvée par les parties au différend, et celles-ci peuvent aussi avoir leur mot à dire sur le règlement de procédure adopté pour une affaire donnée. Cela étant, le Tribunal est bien placé pour profiter pleinement de toutes les différentes possibilités que la Convention et le Statut et le Règlement du Tribunal mettent à sa disposition. Le for le plus adapté et le plus efficace pour le règlement d’un différend donné dépend de la nature du différend. Ceci est particulièrement pertinent au vu des faits nouveaux de notre époque qui touchent le droit de la mer et que la Convention n’avait pas imaginés lorsqu’elle a été rédigée. Ces faits nouveaux comprennent l’élévation du niveau de la mer, les négociations en cours relatives à l’élaboration d’un instrument international juridiquement contraignant se rapportant à la CNUDM et portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, de même que le travail actif des États Parties dans le cadre de l’Autorité internationale des fonds marins en vue d’adopter des règlements relatifs à l’exploitation des ressources minérales de la Zone. Il est peut-être trop tôt, en ce qui concerne les négociations relatives à l’élaboration d’un instrument portant sur la conservation et l’utilisation durable de la biodiversité marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale, pour savoir quel type de mécanisme de règlement des différends pourrait être envisagé, mais comme il s’agirait d’un instrument juridiquement contraignant se rapportant à la Convention, on s’attend à ce que le système existant de règlement obligatoire des différends sur le fondement de la partie XV de la Convention soit dûment pris en compte et que peut-être même l’on attribue au Tribunal un rôle étendu au sein de ce système. Il est également prévisible que le Tribunal, à travers sa Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins, joue un rôle accru dans le règlement des différends relatifs à l’exploitation des ressources minérales dans la Zone, que ce soit dans des affaires contentieuses ou par des avis consultatifs. Je pense par conséquent que le Tribunal est non seulement bien placé pour faire face aux faits nouveaux de notre époque, mais aussi qu’il a un rôle crucial à jouer dans le règlement pacifique des différends qui peuvent en résulter.
Vous avez été Chief State Law Advisor de même que conseiller juridique à la Mission permanente de votre Gouvernement auprès de l’Organisation des Nations Unies, et vous avez aussi enseigné dans le cadre de divers programmes de second et de troisième cycles. Avec votre expérience du droit international qui est autant universitaire que pratique, quels conseils donneriez-vous à de jeunes spécialistes africains intéressés par une carrière dans le droit de la mer ?
En tant que région, l’Afrique a le nombre le plus élevé de ratifications de la Convention et il faut manifestement que les spécialistes africains poursuivent le développement de leurs compétences dans ce que je considère être une partie intégrante et très dynamique du droit international public. Nombreuses sont les possibilités offertes aux spécialistes qui s’intéressent au droit de la mer, notamment le programme de stage du Tribunal et le programme de renforcement des capacités TIDM-Nippon organisé par le Tribunal, de même que l’Académie d’été de la Fondation internationale du droit de la mer. Les États africains ont joué un rôle significatif dans la négociation de la Convention, y compris dans la définition de nouvelles zones maritimes et l’élaboration de notions nouvelles de droit de la mer. Il est donc important que de jeunes spécialistes africains s’appuient sur les aspirations de leurs prédécesseurs et leur donnent effet pour garantir l’utilisation équitable et efficace des océans et de leurs ressources pour le bien de tous. Je considère que c’est ma responsabilité et celle de mes collègues d’aider ces jeunes juristes et spécialistes à réussir. La possibilité de travailler et d’avoir des échanges avec de jeunes spécialistes et fonctionnaires gouvernementaux est l’un des aspects les plus gratifiants de mon travail au Tribunal, et je me réjouis à la perspective de voir ces personnes prendre le relais, pour ainsi dire, pour préserver les idéaux consacrés par la Convention et s’en inspirer. Pour finir, je tiens à rappeler aux jeunes spécialistes africains qu’il faut travailler dur, être patient, profiter des occasions qui se présentent et ne jamais abandonner – l’avenir est entre vos mains !
Conférences et manifestations
La Fondation internationale du droit de la mer a tenu en ligne le 26 septembre 2020 sa conférence Maritime Talks sur le thème « Un air plus propre et un climat meilleur ? Le concours des transports maritimes à la réduction des émissions ». Après l’allocution de bienvenue prononcée par le Président Paik, la conférence avait à son programme les exposés ci-après :
- « Current and prospective international efforts to reduce ship emissions », Edmund Hughes, Agence maritime et des garde-côtes du Royaume-Uni ;
- « A German perspective on the regulation of vessel emissions », Jörg Kaufmann, Office fédéral de la navigation maritime et de l'hydrographie de la RFA ;
- « Blind spots and asymmetry in environmental regulation at sea–clean air, clean fuels and dirty secrets », Sönke Diesener, Union pour la protection de la nature en Allemagne (NABU) ;
- « The shipowners’ perspective on emission reductions and sustainable shipping », Jörg Erdmann, Hapag Lloyd ; et
- « The proposed International Maritime Research and Development Board – A major step towards phasing out GHG emissions? », Guy Platten, Chambre internationale de la marine marchande.
Les exposés peuvent être visionnés à l’adresse suivante : https://www.iflos.org/events/virtual-events/
Renforcement des capacités
Programme TIDM-Nippon Foundation de renforcement des capacités et de formation sur les mécanismes de règlement des différends relatifs à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer
Le programme se déroule actuellement sous forme hybride, avec trois boursiers sur place au Tribunal et quatre autres participant à distance. Le programme de conférences se déroule comme d’habitude, mais aucune excursion n’a été organisée. Nous espérons que tous les boursiers pourront venir à Hambourg et participer à quelques excursions avant la fin du programme en mars 2021. Le passage aux conférences en ligne a non seulement permis d’accueillir des intervenants habituels comme l’ancien juge Wolfrum, qui a fait une conférence sur le traitement des preuves devant les cours et tribunaux internationaux, ou Alina Miron, professeure à l’Université d’Angers, qui a donné une conférence sur la délimitation du plateau continental au-delà de 200 milles marins, mais en plus d’ouvrir le programme à des intervenants qui vivent et enseignent dans des pays plus lointains et d’inclure de nouveaux sujets au programme : comme avec Natalie Klein, professeure à la Faculté de droit de l’Université de la Nouvelle-Galles du Sud à Sydney, qui a fait une conférence sur la paix et la sécurité maritimes, Nilüfer Oral, professeure et directrice du Centre du droit international à l’Université nationale de Singapour, qui a fait une conférence sur l’élévation du niveau de la mer, et Joanna Dingwall, chargée de cours invitée en droit international à l’Université de Glasgow, dont la conférence a porté sur le droit des investissements et l’exploitation minière des fonds marins. Quatre conférenciers éminents présenteront également des thèmes de droit de l’environnement dans les prochaines semaines : les boursiers attendent avec intérêt les conférences de Catherine Redgwell, professeure de droit international public à l’Université d’Oxford et titulaire de la chaire Chichele, de Cymie Payne, professeure agrégée à la Faculté des sciences biologiques et de l’environnement de l’Université Rutgers, de Tamar Meshel, professeure adjointe à la Faculté de droit de l’Université de l’Alberta, et d’Ellen Hey, professeure titulaire à la Faculté de droit de l’Université Érasme de Rotterdam.
Programme de stage
Les stagiaires sortants, Kokougan Messiga (Togo), Aiman Ospankulova (Kazakhstan), Maïa Perraudeau (Royaume-Uni/France) et Louino Volcy (Haïti) ont chacun fait un exposé sur leur sujet de recherche peu de temps avant de quitter le Tribunal en septembre. Leurs exposés étaient intitulés respectivement « La jurisprudence du TIDM en matière de responsabilité internationale », « La Convention des Nations Unies sur le droit de la mer et la protection des droits de l’homme », « Brexit and the quest for ecologically-sound fishing: UK powers and obligations on withdrawal from the Common Fisheries Policy », et « La délimitation des frontières maritimes entre Haïti et la Jamaïque : défis et perspectives ». En octobre, quatre autres stagiaires ont rejoint le Tribunal : Zeynep Karacaoğlu (Turquie), Aurelia Pyneeandee (France), Johanna Romero Loayza (Pérou) et Anh Vo (Viet Nam). Elles réalisent actuellement des recherches pour leur maître de stage respectif au Service juridique et travaillent sur leurs propres projets de recherche.
Un autre exemple de la manière dont le renforcement des capacités s’est adapté à la pandémie et s’est développé en réponse aux restrictions qu’elle impose nous est donné par la série d’exposés des anciens. La série était à l’origine conçue comme un programme à budget zéro visant à accueillir de nouveau au Tribunal les anciens de passage à Hambourg pour qu’ils y présentent leurs travaux de recherche et rencontrent les stagiaires et boursiers alors présents au Tribunal. La vie quotidienne a été transférée en ligne, et la série d’exposés des anciens aussi. Depuis l’été, un nombre croissant d’anciens ont salué la possibilité d’assister aux exposés des anciens ci-après : Mitchell Lennan, doctorant en droit international de la mer à l’Université de Strathclyde, sur le thème « Adapting to fisheries redistribution under climate change: A role for Regional Fisheries Management Organizations? » ; Catherine Blanchard, doctorante à l’Université d’Utrecht et membre de l’Institut néerlandais du droit de la mer (NILOS), sur le thème « The elusive search for sustainable high seas fisheries: What role for an oceans governance approach? » ; Eduardo Jiménez Pineda, doctorant et professeur adjoint de droit international public à l’Université de Cordoue (Espagne), sur le thème « Reflections from a procedural perspective on international arbitration in accordance with UNCLOS, in particular, the jurisdiction of arbitral tribunals under Annex VII of UNCLOS » ; et Carlos A. Cruz Carrillo, sur le thème « The advisory jurisdiction of the plenary of the ITLOS: Problems and opportunities ».
Nous attendons avec intérêt l'exposé à venir de Hilde Woker sur le thème « The law-science interface within the law of the sea ».
A la rencontre des anciens
Rumiana Vladimirova Yotova (Bulgarie), stagiaire au TIDM en 2006 et participante FIDM en 2007. Chargée de cours en droit international à la Faculté de droit de l’Université de Cambridge et chargée de cours et directrice des études de droit au Gonville & Caius College.
J’ai fait mon stage au TIDM en 2006 au cours de ma dernière année de Magister Juris à l’Université de Sofia en Bulgarie. Je venais juste de participer au concours Jessup dans une équipe encadrée par l’ancien juge et professeur Alexander Yankov, travaillant sur une affaire de piraterie et de protection du milieu marin. Je souhaitais approfondir mes connaissances et ma compréhension du droit de la mer, et le professeur Yankov m’a réellement inspirée à cet égard. Le stage m’a offert l’inestimable possibilité d’accéder aux ressources de la bibliothèque du Tribunal et de discuter de mon projet sur l’Affaire de l’usine Mox avec les juristes et les juges, qui étaient très disponibles et prêts à échanger. J’ai été particulièrement fascinée par la possibilité de discuter de la Convention sur le droit de la mer avec ceux qui l’avaient rédigée ! J’ai vraiment aimé mon séjour au TIDM et j’y suis retournée l’année suivante pour la première édition de l’Académie de la FIDM, qui s’est révélée être aussi stimulante que je l’avais espéré.
Après mon stage au Tribunal, je voyais clairement mon avenir dans le domaine du droit international public. J’ai fait un autre stage, à la Direction générale des affaires maritimes et de la pêche de la Commission européenne, faisant ainsi l’expérience du droit international de la mer du point de vue de l’UE. J’ai ensuite fait une maîtrise en droit à Leyde. Puis j’ai fait mon doctorat sous la supervision du professeur James Crawford à l’Université de Cambridge, où je suis restée et où je suis maintenant chargée de cours en droit international.
Le droit de la mer a toujours été ma véritable passion à l’intérieur du droit international. Il a fait naître mon intérêt pour les interactions entre différents régimes de droit international et pour la question de savoir comment résoudre des conflits de normes, ce qui a inspiré ma thèse de doctorat qui porte sur le thème « The Public Policy of International Law ». Mes recherches actuelles dans le domaine naissant du droit international biomédical sont également enrichies par les notions et les principes du droit de la mer. J’examine le statut juridique du génome humain comme patrimoine commun de l’humanité, de même que les implications du droit international de l’environnement pour la réglementation de l’édition du génome. Je rêve de réintroduire un jour le droit de la mer comme l’une des matières enseignées à Cambridge.
Lorsque je repense à mon stage au TIDM, je peux dire sans hésiter qu’il a marqué le début de ma carrière dans le domaine du droit international et que je serai éternellement reconnaissante d’avoir eu cette opportunité !