Lettre d'information 2019/1
Introduction
Ces trois derniers mois, le Tribunal a continué d’examiner l’Affaire du navire « Norstar » (Panama c. Italie). Parallèlement, des activités d’information visant à faire connaître les travaux du Tribunal ont été menées, ainsi que des conférences, des cours et des activités de renforcement des capacités auxquels plusieurs juges, des fonctionnaires du Greffe et moi-même avons participé.
En novembre, j’ai eu le plaisir de prendre part en tant qu’orateur principal à la Conférence internationale sur le droit de la mer de 2018 organisée par la Société coréenne de droit international et le Ministère des affaires étrangères de la République de Corée. Cette conférence était consacrée au rôle du Tribunal en matière de développement du droit de la mer. Dans mon allocution, j’ai souligné l’importance du renforcement de l’état de droit dans les relations internationales, mettant en avant trois éléments fondamentaux qui, par nature, sont interdépendants et se renforcent mutuellement : premièrement, un ensemble de règles bien développé; deuxièmement, un ensemble d’institutions qui appliquent les lois de façon équitable et cohérente ; troisièmement, une attitude positive de la communauté internationale à l’égard de l’état de droit. J’estime que le Tribunal est un des acteurs les plus importants pour la promotion et le renforcement de l’état de droit dans le domaine des océans, car il permet le règlement des différends maritimes par des moyens pacifiques en s’appuyant sur l’interprétation et l’application de la Convention. Les programmes de renforcement des capacités et les activités d’information du Tribunal contribuent à développer les capacités relatives au droit de la mer et au règlement pacifique des différends, en particulier dans les pays en développement, et favorisent une attitude positive à l’égard de l’état de droit.
L’importance des travaux du Tribunal a été confirmée par l’adoption, le 11 décembre 2018, de la résolution 73/124 de l’Assemblée générale sur les « Océans et le droit de la mer », dans laquelle l’Assemblée a « [noté] avec satisfaction que le Tribunal continue d’apporter une contribution notable au règlement pacifique des différends conformément aux dispositions de la partie XV de la Convention et souligne qu’il joue un rôle important et fait autorité dans l’interprétation et l’application de la Convention et de l’Accord relatif à l’application de la partie XI ». Le jour de l’adoption de la résolution, j’ai eu le plaisir de prendre la parole devant l’Assemblée générale et de lui faire rapport sur les travaux du Tribunal. Il est ressorti clairement des déclarations que les représentants des Etats ont faites à cette occasion que les Etats accordent une place de plus en plus importante aux océans et aux ressources marines. Le 13 décembre 2018, le Tribunal a, conjointement avec la Division des affaires maritimes et du droit de la mer, organisé une « Réunion d’information sur le règlement des différends par le TIDM » au Siège de l’Organisation des Nations Unies. La réunion a été une excellente occasion pour nous de dialoguer avec les représentants des missions permanentes.
Pour revenir à Hambourg, deux nouveaux films ont été produits et peuvent à présent être visionnés sur notre site Web : dans le premier, le Greffier examine comment le Tribunal pourrait aider les Etats à régler leurs différends relatifs aux pêcheries. Dans cet entretien, il parle des affaires que le Tribunal a déjà traitées, des moyens de droit pour introduire une instance et de la marche à suivre par un Etat dont les stocks de poissons courent un risque imminent de dommage. Dans le second entretien filmé, je parle de ce que le Tribunal peut faire pour aider les transporteurs maritimes à apporter une réponse en cas de saisie ou de demande de dommages-intérêts ou de réparation. Le Tribunal est souvent amené à connaître de différends liés au transport maritime et il peut rapidement apporter une assistance pour obtenir la mainlevée de l’immobilisation d’un navire et la libération de son équipage dans certaines conditions. Il peut également accorder une indemnité à l’Etat du pavillon et à des acteurs privés qui prennent part au transport maritime pour les dommages qu’ils ont subis. Il est important de rappeler que la Convention, à laquelle 168 Etats sont parties, offre un mécanisme assurant une protection juridique quasi universelle au secteur du transport maritime en cas de saisie ou de demandes de dommages-intérêts ou de réparation.
Espérant que vous appréciez la lettre d’information,
Je vous présente mes sincères salutations,
Jin-Hyun Paik
Président
Entretien avec le Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries, M. le juge Tomas Heidar
Vous avez été nommé juge au Tribunal en 2014 après avoir été le Conseiller juridique du Ministère islandais des affaires étrangères pendant près de 20 ans. Comment compareriez-vous ces deux fonctions ?
Ces deux fonctions sont fondamentalement différentes, mais elles ont une caractéristique commune, l’accent mis sur le droit de la mer. En effet, il va sans dire qu’une partie considérable du travail d’un conseiller juridique du Ministère des affaires étrangères d’un Etat insulaire situé au milieu de l’Océan Atlantique concerne le droit de la mer, y compris la pêche, le plateau continental et la délimitation maritime. La personne qui remplit cette fonction, naturellement et avant tout, cherche à protéger les intérêts de son pays et à faire connaître les vues de celui-ci au niveau international, même si elle s’emploie aussi à défendre des intérêts mondiaux communs. Je suis très fier d’avoir représenté l’Islande, j’ai en particulier éprouvé beaucoup de plaisir à négocier avec les pays voisins et dans le cadre de l’ONU sur les questions ayant trait aux océans, et ma plus grande satisfaction a probablement été de contribuer au règlement de différends avec d’autres pays.
Cette expérience me sert dans mes fonctions de juge au Tribunal. Toutefois, il m’incombe à présent de comparer les arguments des parties à un différend puis de procéder à une évaluation et de prendre une décision de façon objective. Cette fonction me convient fort bien. L’activité judiciaire est très exigeante et un juge assume de grandes responsabilités, mais cela me procure une satisfaction considérable. C’est pour moi à la fois un privilège et un honneur d’occuper cette fonction au sein d’un organe aussi prestigieux que le TIDM.
Vous occupez les fonctions de Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries depuis octobre 2017. Pouvez-vous nous préciser à quoi sert la Chambre ?
En règle générale, c’est le Tribunal plénier qui connaît des différends. Toutefois, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer a créé une Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins et a en outre autorisé le Tribunal à constituer des chambres pour connaître de catégories déterminées d’affaires. Ainsi, le Tribunal a constitué quatre chambre spéciales : la Chambre de procédure sommaire ; la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries ; la Chambre pour le règlement des différends relatifs au milieu marin ; la Chambre pour le règlement des différends relatifs à la délimitation maritime. J’estime que cette décision était une preuve de clairvoyance car nous vivons dans un monde qui devient de plus en plus complexe, technique et spécialisé.
La Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries, qui se compose de neuf membres, est prête à connaître des différends relatifs à la conservation et à la gestion des ressources biologiques marines que les parties peuvent convenir de lui soumettre. Un nombre considérable de différends entre Etats dans le domaine du droit de la mer ont trait aux pêcheries et je considère par conséquent qu’il est approprié d’offrir une chambre spéciale prête à connaître de ces différends de façon efficace.
Le mécanisme obligatoire pour le règlement des différends relatif aux pêcheries prévu par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer est fort compliqué du fait des limites imposées à son application, énoncées à l’article 297, paragraphe 3, de la Convention concernant les différends relatifs aux droits souverains de l’Etat côtier à l’intérieur de sa zone économique exclusive. Les différends relatifs aux pêcheries deviennent aussi de plus en plus scientifiques et compliqués du fait des changements environnementaux.
L’avis consultatif rendu par le Tribunal en 2015 suite à la demande soumise par la Commission sous-régionale des pêches, concernant la pêche illicite, non déclarée et non réglementée (INN) est particulièrement important. L’avis concerne principalement les obligations et les responsabilités de l’Etat du pavillon en la matière. J’estime que l’avis consultatif sert de ligne directrice pour les Etats côtiers qui doivent évaluer si un Etat du pavillon s’est acquitté de ses obligations à l’égard de ses navires de pêche dans une situation donnée et, en conséquence, s’il y a lieu de prendre des mesures, y compris juridiques, à l’encontre de l’Etat en question.
Je pense que l’existence de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux pêcheries et des autres chambres spéciales présente comme autre avantage celui d’assurer un intérêt constant pour ces questions et le maintien des compétences spécialisées connexes au niveau du Tribunal. Le Tribunal tient deux sessions administratives par an, durant lesquelles les chambres examinent les faits nouveaux survenus dans leurs domaines respectifs et en prennent acte.
Vous êtes également le Président du Comité des relations publiques du Tribunal. Quel est le rôle de ce Comité ?
Le Comité supervise les activités relatives aux relations publiques et formule des recommandations à l’intention du Tribunal en la matière. Il est important de faire mieux connaître aux Etats les différentes procédures relatives au règlement des différends par le Tribunal. Pour cela, des programmes de renforcement des capacités sont offerts au Tribunal : le programme de renforcement des capacités et de formation du TIDM et de la Nippon Foundation, le programme de stage et l’Académie d’été de la Fondation internationale du droit de la mer, qui sont tous à financement spécial. En outre, le Tribunal organise périodiquement des ateliers régionaux dans les pays en développement.
Je considère qu’il est indispensable de faire connaître le Tribunal et de mettre en évidence ses atouts. C’est le seul tribunal spécialisé dans le droit de la mer au monde, et non seulement son efficacité permet de gagner du temps mais il est également financièrement intéressant car les Etats parties à la Convention sont exonérés des frais de justice.
Que pensez-vous de Hambourg et des installations au Tribunal ?
Le Tribunal est situé dans un très beau cadre près de l’Elbe, à la périphérie de Hambourg et offre d’excellentes installations pour les juges, le personnel du Tribunal et les conseils des parties à une affaire. J’ai constaté que les personnes qui sont engagées dans les travaux exigeants relatifs aux affaires dont le Tribunal est saisi peuvent apprécier l’environnement motivant qu’il offre.
Sur un plan personnel, j’apprécie hautement d’être à Hambourg. Je suis islandais et cela a été un honneur pour moi que l’Islande et d’autres pays nordiques aient présenté ma candidature, mais j’ai aussi des origines allemandes du côté de ma mère, qui est allemande. Je parle allemand couramment et je suis heureux d’avoir la chance de retrouver mes racines germaniques.
Conférences et manifestations
Le Président Paik a prononcé son allocution annuelle devant l’Assemblée générale des Nations Unies, au titre du point 78 a) de l’ordre du jour, intitulé « Les Océans et le droit de la mer », le 11 décembre 2018. Le texte de l’allocution est accessible ici.
Une « Réunion d’information sur le règlement des différends par le TIDM » s’est tenue au Siège de l’ONU à l’intention des représentants des missions permanentes le 13 décembre 2018. La Directrice de la Division des affaires maritimes et du droit de la mer (DOALOS), Mme Gabriele Goettsche-Wanli, a souhaité la bienvenue aux participants, puis le Président a parlé de « L’expérience du Tribunal en matière de règlement de différends relatifs au droit de la mer » et le Greffier a présenté le thème « Introduction d’une instance et conduite d’une affaire ». Mme Amanda Stoltz, juriste adjointe à DOALOS a présenté des informations sur les demandes d’assistance financière du Fonds d'affectation spéciale du TIDM pour les frais encourus au titre des affaires dont le Tribunal est saisi. Une soixantaine de représentants ont participé à la réunion.
Participation du TIDM à des conférences
Le Président Paik a prononcé un discours liminaire sur le thème « Rule of law in the world's oceans and the role of ITLOS » à l’ouverture de la conférence internationale sur le droit de la mer organisée par la Société coréenne de droit international (Korean Society of International Law) et le Ministère des affaires étrangères de la République de Corée les 14 et 15 décembre 2018, à Séoul. Durant la conférence, le Greffier a fait un exposé intitulé « An overview of ITLOS: organization, procedure and role in the dispute-settlement mechanism under UNCLOS » et le juge Hoffman a prononcé une allocution intitulée « Advisory function of ITLOS in deep seabed mining and fishing activities » (La fonction consultative du Tribunal dans les domaines de l’exploitation minière des grands fonds marins et des activités de pêche). Le juge Kittichaisaree a présidé une table ronde sur le thème « Landmark cases of ITLOS and other dispute-settlement bodies under UNCLOS and its effect on maritime order », le juge Cabello une table ronde sur le thème « Ways forward for ITLOS in developing the law of the sea », durant laquelle le juge Jesus a fait un exposé intitulé « The role of ITLOS in addressing new challenges for the legal order of seas and oceans ».
Le 18 janvier 2019, à l’invitation du Professeur Georg Nolte, titulaire de la chaire de droit public, de droit international et de droit européen de l’Université Humboldt, à Berlin, le Président Paik a donné une conférence sur le thème « The rule of law at sea and the role of ITLOS », qui a attiré de nombreux chercheurs et étudiants à la bibliothèque Wengler de l’Université.
Le Greffier, après avoir participé l’an passé à la Formation au droit international de la pêche organisée par l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Institut de droit maritime international (Malta), a poursuivi sa coopération avec les programmes de renforcement des capacités de la FAO en prononçant une allocution intitulée « UNCLOS and dispute-settlement mechanisms in fishing matters », cette fois-ci à Vigo (Espagne), dans le cadre de la formation des inspecteurs aux mesures du ressort de l’Etat du port organisée le 3 décembre 2018 par la FAO en partenariat avec le Port de Vigo, la MarinnLeg Foundation, la Xunta de Galicia, Secretaria General de Pesca et la Commission européenne.
Programmes de renforcement des capacités
Programme TIDM-Nippon Foundation de renforcement des capacités et de formation sur les mécanismes de règlement des différends relatifs à la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer
Le programme de bourses d’une durée de neuf mois arrivera à son terme pour les six boursiers qui sont actuellement au Tribunal. En novembre et décembre, les boursiers ont assisté à des cours sur des thèmes tels que les affaires relatives à la pollution par les navires portées devant les tribunaux nationaux et internationaux, la délimitation maritime et la protection du milieu marin. Les boursiers ont également suivi une formation d’une semaine sur le droit international de l’environnement. Des spécialistes de l’Autorité internationale des fonds marins, de la Commission des limites du plateau continental, de l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture et de la Commission océanographique intergouvernementale ont fait des exposés devant les stagiaires, qui ont également participé à des cours sur le règlement des conflits et la négociation à la Fondation Max Planck pour la paix internationale et l’état de droit à Heidelberg (Allemagne) et sur le droit procédural international à l’Institut Max Planck de droit procédural réglementaire international et européen au Luxembourg.
Les boursiers termineront leurs travaux de recherche respectifs ces prochaines semaines et les présenteront aux juges durant la prochaine session administrative.
Programme de stage
Les trois stagiaires au Service juridique, Arnold Egon (Cameroun), Kristina Gurova (Bulgarie) et Yunjin Kim (République de Corée), qui ont été parmi nous jusqu’en décembre, ont achevé leur stage par des exposés sur « Les tribunaux arbitraux constitués en vertu de l'Annexe VI de la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer », « The legal framework of marine protected areas under UNCLOS: the high seas of the Arctic Ocean » et « The legal regime applicable to the exploration and exploitation of marine genetic resources in areas beyond national jurisdiction ». Les trois nouveaux stagiaires, Jean Raoul Meles Esmel (Côte d’Ivoire), Sebastián Preller Borquez (Chili) et Xiangzin (Lily) Xu (Chine), commencent juste leur stage auprès du Service juridique.
Comme on peut s’y attendre, chaque mois, le Tribunal reçoit de nombreuses demandes de stage auprès du Service juridique. La possibilité d’effectuer un stage auprès de la bibliothèque, du Service de presse ou des Services linguistiques est sans doute moins connue. Si vous êtes étudiant en bibliothéconomie ou gestion de l’information, traduction ou interprétation ou relations publiques, communication ou journalisme, étudiez cette possibilité de participer au programme. Vous trouverez sur les pages de notre site Web consacrées à la formation les informations pertinentes, les bourses disponibles pour les ressortissants de pays en développement et les formulaires de candidature.
Réseau des Anciens du TIDM
Le Réseau des Anciens du TIDM, qui compte plus de 400 membres, est en progression constante. Le Tribunal s’efforce de rester en contact avec le plus grand nombre possible d’entre eux, de les tenir au courant des conférences auxquelles participent des Anciens, de publications et des réunions qui se tiennent dans le monde. Une nouveauté du trimestre passé est l’organisation d’une série d’exposés par des Anciens du Tribunal, qui a permis à d’anciens stagiaires et boursiers de présenter leurs travaux de recherche ou leurs tâches au groupe actuel de stagiaires et de boursiers. Les Anciens sont invités à revenir au Tribunal ou à faire leur exposé en ligne. A ce jour, des exposés ont ainsi été faits sur « Administered contractors for hydrocarbon extraction in Brazil » par Cintia Nunes, stagiaire en 2017 et doctorante à l’Université Erasmus à Rotterdam et sur « UNCLOS: the international duty to cooperate and cetaceans » par Rob Steenkamp, stagiaire en 2016 et doctorant à l’Université de Hambourg. Nous avons hâte d’accueillir d’autres Anciens qui reviendront au Tribunal à l’avenir.
Académie d’été 2019 de la Fondation internationale du droit de la mer
La treizième Académie d’été de la Fondation internationale du droit de la mer, sur le thème « Promouvoir la gouvernance des océans et le règlement pacifique des différends » se tiendra au Tribunal du 21 juillet au 16 août 2019. On trouvera des informations sur le programme et la procédure de candidature sur le site Web de la Fondation.
A la rencontre des anciens
Mme Grace Kaue, boursière de la Nippon Foundation en 2018/2019, juriste principale (Oceans Project Secretariat), Cabinet du State Solicitor, Département de la Justice et de l’Attorney General, Papouasie-Nouvelle-Guinée
En 2015, le Gouvernement de la Papouasie-Nouvelle-Guinée a décidé de créer un Bureau des affaires maritimes pour appliquer la loi sur les zones maritimes du pays de 2017. Il s’agit notamment d’élaborer une politique nationale relative aux océans pour guider la mise en œuvre d’un cadre de gestion et de gouvernance par zone basé sur la Convention. L’espace maritime de la Papouasie-Nouvelle-Guinée est trois fois plus vaste que le territoire terrestre mais il est moins développé dans certaines zones au plan de la politique et de la réglementation.
La loi sur les zones maritimes couvre tous les aspects de l’utilisation des océans et les droits et responsabilités des différents organismes gouvernementaux, entre autres les droits de navigation et de passage en transit, les droits d’exploiter les ressources naturelles de la mer et du plateau continental, la protection du milieu marin et la conduite de la recherche scientifique marine. Le plan de gestion par zone établi en vertu de la loi sur les zones maritimes, toutefois, est à l’heure actuelle fragmenté et doit faire l’objet d’une coordination. J’ai rejoint le Oceans Project Secretariat, au Département de la Justice et de l’Attorney General pour contribuer à la coordination des représentants de l’équipe des frontières maritimes, des secteurs du transport maritime, des pêches et des industries extractives, en recueillant les contributions des nombreuses parties prenantes aux niveaux national, régional et provincial pour créer un cadre d’action rassemblant tous les acteurs. J’ai déposé ma demande de candidature au programme de bourses du Tribunal au printemps 2018 dans l’espoir de participer à un programme intensif de cours sur un large éventail de sujets ayant trait aux utilisations des océans, l’idée étant de retourner dans mon pays à l’issue du programme avec une connaissance approfondie de la Convention, une meilleure compréhension des problèmes actuels qui concernent les océans, en emportant comme bagage une panoplie d’instruments juridiques à appliquer à l’élaboration d’une politique océanique. Je n’ai pas été déçue.
Il existe un certain nombre de programmes de renforcement des capacités ouverts à ceux qui travaillent dans ce domaine. Nombre d’entre eux comprennent un ensemble de cours, la plupart une période de recherche. Mais ce stage est unique. Ce qui le distingue des autres est que le programme ne concerne pas que la recherche, il permet également d’avoir des expériences en groupe restreint, de rencontrer les personnes qui travaillent dans le domaine du droit de la mer, chargées de son élaboration et de son application. Grâce à des modules de cours bien structurés, les stagiaires bénéficient d’échanges enrichissants qu’ils n’ont jamais eus auparavant avec les juges du Tribunal, des universitaires et des praticiens, ainsi qu’avec des conseils dans les affaires relatives au droit de la mer. On apprend comment l’élaboration et la rédaction de la Convention se sont déroulées et comment elle est appliquée aujourd’hui.
Chez moi ou dans une bibliothèque, je peux suivre les travaux de la Commission des limites du plateau continental ou lire sur ceux menés par la FAO en matière de pêche INN ou par la Commission océanographique intergouvernementale, qui relève de l’UNESCO. Mais dans le cadre du programme de bourses, on peut rencontrer un commissaire de la Commission des limites du plateau continental, le Chef du Service droit et développement de la FAO, assister à une conférence qu’ils donnent et leur poser des questions directement. Je peux indépendamment étudier les travaux de l’Union européenne sur la lutte contre la pêche INN et sur la conservation de la biodiversité marine des zones situées au-delà des limites de la juridiction nationale, mais j’ai eu l’occasion de parler, à Bruxelles, aux représentants de la Direction générale des affaires maritimes et de la pêche de la Commission européenne, à Londres à un juriste de l’OMI, à La Haye aux équipes juridiques qui travaillent à la Cour internationale de Justice et à la Cour permanente d'arbitrage. Une grande place est faite au dialogue, aux visites dans les diverses organisations ou aux rencontres avec leurs spécialistes à Hambourg, toutes choses qui nous aident à comprendre les aspects opérationnels de la mise en œuvre de la Convention.
Le socle de ce programme est, bien sûr, l’étude du mécanisme de règlement des différends de la Convention, et durant les plus de neuf mois que dure ce programme les participants approfondissent leur compréhension des mesures à prendre avant de soumettre un différend à un tribunal, ce au moyen de cours théoriques et d’exercices pratiques sur la négociation, la médiation et la conciliation. Le programme de formation sur les mécanismes de règlement des différends qu’offre l’Institut Max Planck de droit procédural réglementaire international et européen au Luxembourg met l’accent sur cela. Je dois ajouter que suivre la conduite d’une affaire dont le Tribunal est saisi a été pour moi un moment fort de ce stage. J’ai hautement apprécié l’occasion qui m’a été offerte de voir comment les aspects procéduraux, théoriques et pratiques d’une affaire se combinent. Les cours théoriques correspondants dispensés parallèlement nous ont porté notamment sur la soumission d’une affaire, la gestion d’une affaire, l’élaboration des actes de procédure, la doctrine et la plaidoirie orale. Un autre moment spécial a été la visite à La Haye, qui a été pour nous l’occasion de voir comment les différents organes de règlement de différends constitués en application de la Partie XV de la Convention font en fait partie d’un même système et comment ils constituent un ensemble cohérent.
Mes travaux de recherche, qui portent sur le cadre de gouvernance et de gestion dans la Zone et l’élaboration de normes pour un cadre national relatif à l’exploitation des ressources minières des grands fonds, ont été supervisés par le Greffier du Tribunal. Des réunions et un examen périodiques de mes travaux m’ont permis de bénéficier de ses compétences et de ses conseils, ainsi que de ceux d’autres membres du personnel du Greffe. Toutes ces activités reçoivent l’appui de la très riche bibliothèque du Tribunal, sont étayées par notre visite à la Fondation Max Planck à Heidelberg et, bien sûr, les cours dispensés dans ce module par Alfonso Ascencio-Herrara (Conseiller juridique, Secrétaire général adjoint, Autorité internationale des fonds marins), le juge Hoffmann (Président de la Chambre pour le règlement des différends relatifs aux fonds marins) et Urs Engels, Conseiller principal aux politiques et Directeur adjoint de la Division du Ministère fédéral des affaires économiques et de l’énergie, et chef de la délégation allemande auprès de l’Autorité internationale des fonds marins. Il convient de mentionner également une visite à l’Institut fédéral des géosciences et des ressources naturelles à Hanovre (Allemagne), qui est responsable de la phase d’exploration de l’extraction minière des fonds marins pour le Gouvernement allemand.
Il est particulièrement important d’établir des réseaux et des contacts, et le programme m’a offert des occasions incroyables de rencontrer des juges, des spécialistes et des praticiens mais aussi de constituer un réseau entre les participants à l’Académie d’été, ceux qui ont participé avec moi au programme, les stagiaires et les Anciens du TIDM.
Comment vais-je tirer parti des connaissances que j’ai ainsi acquises ? Mes fonctions, qui consistent à élaborer une politique de gouvernance des océans pour mon pays, sont fort exigeantes. Des questions telles que l’exploitation des ressources minières des fonds marins ou la pêche INN nécessitent des efforts plus coordonnés et plus transparents pour garantir que l’utilisation de ces ressources ait des retombées à tous les niveaux, aussi bien national et provincial que local. J’espère qu’une fois rentrée dans mon pays la solide base que cette formation m’a donnée m’aidera à mieux contribuer à la formulation de recommandations appropriées. Ayant acquis une meilleure compréhension de la Convention, je rentre motivée pour travailler à l’élaboration d’une politique relative aux océans, armée d’un large ensemble de contacts qui pourront m’apporter des informations en cas de besoin.
J’espère que la renommée de ce programme de formation s’étendra. Il est de plus en plus important de faire connaître la Convention, en particulier sa procédure de règlement des différends. Je considère que chaque stagiaire qui rentre dans son pays à l’issue du programme est un ambassadeur pour le Tribunal et les travaux de celui-ci, ainsi que pour les océans. Je recommande sans réserve de présenter une demande de participation, car c’est une expérience unique.
Manifestations à venir
L’Arrêt dans l’Affaire du navire « Norstar » (Panama c. Italie) doit être rendu en avril 2019.
Le Tribunal tiendra son treizième atelier régional à Montevideo (Uruguay) les 15 et 16 mai 2019.
La treizième Académie d’été de la Fondation internationale du droit de la mer, sur le thème « Promouvoir la gouvernance des océans et le règlement pacifique des différends », se tiendra au Tribunal du 21 juillet au 16 août 2019. On trouvera des informations sur le programme et la procédure de candidature sur le site Web de la Fondation.